Christophe Dabiré à la tribune de la Conférence internationale du travail ce mercredi 12 juin 2019

Présent depuis quelques jours à Genève en Suisse dans le cadre de la Conférence internationale du travail (CIT) de l’Organisation internationale du travail (OIT) avec des membres de son gouvernement, le Premier ministre burkinabè Christophe Dabiré a prononcé ce mercredi 12 juin, une allocution à la tribune de la CIT. Occasion  pour le chef du gouvernement burkinabè «de décliner les grandes orientations de notre politique en faveur du plein épanouissement du monde du travail ». Voici  l’intégralité du discours prononcé par Christophe Dabiré.

Christophe Dabiré à la tribune de la Conférence internationale du travail ce mercredi 12 juin 2019

«Avant tout propos, je voudrais transmettre les salutations fraternelles de son Excellence, Roch Marc Christian KABORE, Président du Faso, à ses homologues Chefs d’Etat ainsi qu’aux Chefs de Gouvernement venus célébrer, ici à Genève, le centenaire de notre organisation.

La 108eme session de la Conférence internationale du travail offre l’opportunité à mon pays, le Burkina Faso, de traduire sa pleine adhésion aux réflexions engagées autour des grands défis actuels et futurs qui interpellent le monde du travail.

Je voudrais profiter de cette occasion pour adresser mes sincères félicitations au Président et à l’ensemble des membres du Bureau, pour leur brillante élection et leur disponibilité à conduire les destinées de notre organisation au cours de cette année de mandature. Soyez assurés du total soutien de mon pays.

Permettez-moi, ensuite, de traduire toute ma gratitude à Monsieur Guy RYDER et à toutes les instances de l’OIT pour les réflexions qui ont conduit à la rédaction du rapport mondial sur l’avenir du travail, pivot de la célébration du centenaire de notre organisation à travers le monde.

 

Monsieur le Président,

Distingués Délégués,

Je voudrais saisir cette occasion qui m’est offerte pour rendre un vibrant hommage à tous les devanciers de notre organisation pour les efforts et les sacrifices consentis aux fins de donner un visage humain à notre société.

En effet, depuis 1919, l’OIT, la plus ancienne des Organisations du système des Nations Unies, n’a cessé d’œuvrer, avec courage et persévérance à travers les femmes et les hommes qui l’animent, pour faire de la justice et de la paix sociales une réalité dans le monde.

Ce noble combat que notre organisation a mené et continue de mener a conduit à des résultats très significatifs, grâce à son système de fonctionnement basé, entre autres, sur le principe du tripartisme.

Oui ! De tous les types de négociation ou de consultation possibles, le tripartisme, tel que défini par l’OIT, est ce mécanisme qui permet de promouvoir un dialogue social fécond susceptible d’aboutir, grâce au jeu de rapprochement des vues sur des questions d’intérêts parfois contradictoires, à un consensus dans l’objectif de favoriser la paix et la stabilité sociale. Gouvernement, employeurs et travailleurs en arriveront à définir les principes d’une collaboration fructueuse pour stimuler l’économie et améliorer en dernier ressort les conditions sociales du travail.

 

Cette solidité de l’institution tient à la consistance de son acte fondateur et aux importantes annexes qui l’accompagnent, notamment la déclaration de Philadelphie et celle relative aux principes et droits fondamentaux au travail. Elle tient également aux réflexions fécondes qu’elle fait sur les problématiques du travail à travers le monde.

Pour la pérennité de notre organisation, il est important de travailler à renforcer et à réadapter cet acte fondateur en fonction des mutations voulues ou imposées à notre monde.

A cet égard, il convient de relever que les analyses et les recommandations du rapport de la Commission sur l’avenir du travail, que j’ai évoqué tantôt, ne sauraient nous laisser indifférents. A cette époque charnière, où depuis trois décennies, l’humanité est en proie aux effets dévastateurs du réchauffement climatique et aux malaises croissants liés aux inégalités économiques et sociales, nous sommes tous appelés à opérer des transformations salutaires qui visent l’instauration d’une véritable justice sociale.

Face à cette situation mondiale, s’interroger sur l’avenir du travail, revient à se préoccuper de l’avenir de notre humanité, tout particulièrement, l’avenir de plus d’un milliard de femmes, d’hommes et de jeunes dont la majorité vit dans les pays du Sud et la moitié sur le continent africain.

Pour l’avenir de toutes ces populations, nous devons revisiter notre concept du « travail », redonner un contenu approprié au « travail décent » et remettre la dignité humaine au cœur de notre paradigme de développement.

Par ailleurs, si les droits des travailleurs du secteur secondaire et tertiaire sont codifiés, structurés et mieux protégés, tout en faisant l’effort d’intégrer les nouvelles formes de travail qu’offrent l’économie virtuelle et les nouvelles technologies, il est impératif, au nom de la justice sociale, d’élargir les champs du travail décent à toutes les formes d’activité humaine qui contribuent à la vie individuelle et collective de manière directe ou indirecte.

Il est tout aussi impératif d’élargir le champ du Contrat social, en intégrant dans les politiques publiques les mesures qui visent à prendre en compte à travers des cadres juridiques, toutes les formes de travail, formel ou informel, visible et invisible. C’est à cette condition que le dialogue social revêtira tout son sens démocratique et inclusif afin de ne laisser personne au bord du chemin.

C’est pourquoi, il convient de souligner qu’un des défis majeurs que l’OIT devra relever à l’entame de son deuxième siècle d’existence reste la recomposition de son Conseil d’administration pour prendre en compte les régions faiblement représentées, conformément aux dispositions de l’instrument de 1986 portant amendement de la Constitution de notre Organisation. Dans cette perspective, le Burkina Faso est partie prenante de la position des chefs d’Etats africains sur cette question importante.

J’invite donc le directeur général du BIT, à multiplier les efforts dans cette dynamique.

 

Monsieur le Président,

Distingués Délégués,

Le Burkina Faso tire une grande satisfaction de son appartenance à une si noble et importante organisation. A cet égard, son Gouvernement, en collaboration avec l’ensemble des partenaires sociaux, a répondu favorablement à l’appel du Directeur général du BIT en organisant, du 15 au 17 mai 2019, des activités commémoratives des 100 ans de vie de l’OIT. Il s’est agi pour nous Burkinabè de magnifier les actions directrices de notre organisation commune pour des lendemains meilleurs dans le monde du travail.

Il convient de rappeler que c’est dans cette optique que le Burkina Faso avait tenu à commémorer de manière solennelle le 90ème anniversaire de l’OIT en 2009, couplé avec le 60eme anniversaire de l’Inspection du travail.

Depuis son adhésion à l’OIT en 1960, la participation particulièrement assidue de mon pays aux activités de notre organisation lui a valu notamment :

– 1e, d’occuper différentes fonctions au sein du Conseil d’Administration du BIT : membre suppléant de 2014 à 2017, membre titulaire de 1999 à 2002 et Président de 2001 à 2002 ;

– 2e, d’abriter en 2004 à Ouagadougou le sommet extraordinaire de l’Union Africaine sur l’emploi et la lutte contre la pauvreté en Afrique ;

– 3e, d’organiser en 2009 toujours à Ouagadougou le premier symposium africain sur le travail décent en Afrique.

Monsieur le Président,

Distingués Délégués,

Au cours des 100 ans passés, l’OIT a su mettre la coopération technique au service de la valorisation de ses principes et de la réalisation de ses objectifs. Ainsi, à travers son gigantesque agenda de promotion du travail décent et des appuis y relatifs, de nombreux pays membres, dont le mien se réjouissent des avancées réalisées en la matière.

C’est donc dire que l’histoire commune de mon pays le Burkina Faso, et de l’OIT s’écrit également et surtout en termes d’acquis dans différents domaines de coopération.

Sans être exhaustif, des actions ont été menées dans les domaines ci-après :

– 1e, le programme pays de promotion du travail décent, dont la deuxième phase est en cours de formalisation ;

– 2e, le projet « BIT-gouvernance » dont le processus d’exécution est en cours ;

– 3e, la promotion du dialogue social et l’extension de la protection sociale ;

– 4e, l’amélioration des conditions de vie des femmes rurales par le projet de « Formation communautaire pour un travail décent ».

Je salue à sa juste valeur les acquis de notre organisation commune et j’émets le souhait que beaucoup d’autres initiatives puissent voir le jour pour le bonheur de nos laborieuses populations.

 

Monsieur le Président,

Distingués Délégués,

 

Aujourd’hui, le Burkina Faso peut se féliciter d’être en phase avec les principes cardinaux et les objectifs de l’OIT. En effet, au-delà de la ratification des conventions suivie de leur mise en œuvre, il a affirmé le rôle régalien qui est le sien de garantir le droit du travail, en créant un cadre institutionnel favorable à la promotion de ces principes.

J’en veux pour preuve, la ratification par notre pays de quarante-quatre (44) conventions de l’OIT, dont les huit (08) conventions fondamentales et les quatre (04) conventions prioritaires.

Mon Gouvernement a fait de la promotion du dialogue social un gage sine qua non de la gestion participative des questions préoccupant le monde du travail.

Ainsi, il a été institué, au niveau national, un certain nombre de cadres qui participent à la prévention et à la gestion des crises au sein du monde du travail. Il s’agit notamment :

– 1e, de la rencontre annuelle Gouvernement/Syndicats instituée en 2008 ;

– 2e, de la rencontre Gouvernement/Patronat instituée en 2017;

– 3e, du Haut Conseil du Dialogue Social (HCDS) créé en 2017 et rattaché à la Présidence du Faso, dont une délégation conduite par son Président participe à cette session.

Dans un contexte sous régional marqué par la recrudescence du terrorisme, la lutte contre la pauvreté, les inégalités et le chômage qui en sont le terreau favorable, est indispensable. L’une des réponses les plus fortes parce que durables est de mettre en place l’infrastructure économique de base en vue de promouvoir des actions de développement et d’assurer la résilience des populations contre ce fléau.

Fort de ce constat, le Gouvernement de mon pays s’est doté en 2016 d’un programme d’urgence pour le sahel (PUS-BF), visant à mettre l’action de développement au service de la sécurisation de cette région fortement touchée par le terrorisme.

Aujourd’hui, nous avons engrangé sur le terrain des résultats remarquables qui nous confortent dans notre conviction qu’il est indispensable de l’étendre à d’autres régions à fort défi sécuritaire. Les résultats sont encourageants certes, mais ils seront encore plus éclatants si des partenaires, soucieux de paix, de fraternité et d’amitié entre les peuples, manifestaient leur générosité à notre égard en soutenant ce programme d’urgence.

 

Monsieur le Président,

Distingués Délégués,

Mon pays fonde l’espoir que la déclaration du centenaire, qui va sans doute couronner les présents travaux, mettra un accent particulier non seulement sur le processus d’amélioration de la gouvernance de l’OIT, mais aussi et surtout sur le renforcement des mécanismes d’accompagnement des Etats membres en vue de la réalisation de l’agenda pour le travail décent.

Pour ma part, j’ai la ferme conviction que l’avenir du travail réside dans notre capacité à nous adapter à l’évolution technologique et à mettre ces outils modernes au service des leviers de développement.

Pour joindre l’acte à la parole, mon Gouvernement s’est inscrit dans une dynamique de modernisation de son Administration du travail et du marché de l’emploi, à travers deux outils principaux. Il s’agit de l’Observatoire national de l’emploi et de la formation (ONEF) qui permet la publication des offres d’emploi et la recherche d’emplois au profit des acteurs du monde du travail.

Il s’agit également du développement d’une application dénommée Système d’Inspection du Travail Automatisée (SITA) au profit de l’Administration du travail.

Ce système qui est à sa phase d’expérimentation devra à terme permettre une gestion électronique de l’ensemble des actes de l’inspection du travail, la production de données statistiques fiables ainsi que la saisine en ligne des services d’inspection du travail par les demandeurs.

 

Monsieur le Président,

Distingués Délégués,

Pour clore mon propos, qu’il me soit permis de réitérer mes félicitations aux membres des Conseils d’administration du BIT, au Directeur général et à tous les travailleurs du BIT qui, depuis le lancement des activités de cette commémoration, n’ont ménagé aucun effort pour nous préparer une si belle rencontre.

Je voudrais vous rappeler que notre organisation est encore très attendue dans les cent (100) prochaines années sur les questions existentielles de la justice sociale et du travail décent dans le monde.

Nous devons donc, plus que jamais, construire l’avenir du travail autour du principe d’inclusion de toutes les parties du monde et surtout de la prise en compte de tous les types de travail.

Au regard des expériences acquises en cent (100) ans d’existence de l’OIT, j’ai foi en notre capacité d’y parvenir.

Sur ce, je souhaite plein succès à nos travaux.

Je vous remercie.»

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