Dans le cadre d’une participation à la Semaine russe de l’énergie, le ministre de l’énergie Simon-Pierre Boussim a signé, au nom du gouvernement burkinabè, ce vendredi 13 octobre 2023 à Moscou, un mémorandum d’entente pour la construction d’une centrale nucléaire au Burkina. Côté russe, c’est Nikolay Spasski, directeur général adjoint de l’agence nucléaire Rosatom, qui a signé le mémorandum.

L’objectif de cette option burkinabè pour l’énergie nucléaire, c’est de parvenir à satisfaire les besoins du pays, encore dépendant des importations ghanéennes et ivoiriennes. «Notre défi est de doubler notre production d’électricité d’ici 2030», a indiqué le ministre de l’énergie, Boussim.

Lors du dernier sommet Russie-Afrique, le Président de la Transition Ibrahim Traoré avait exprimé clairement au partenaire russe cette doléance pour la construction d’une centrale nucléaire dans le pays.

Plusieurs autres pays africains déjà en lice pour l’énergie nucléaire

Cette signature de mémorandum vient ainsi marquer un pas supplémentaire vers la réalisation de l’infrastructure même si beaucoup d’autres étapes, notamment techniques et financières restent encore à être satisfaites pour espérer passer à l’étape de la construction proprement dite.

Au regard des besoins réels, le Burkina Faso et la Russie gagneraient à accélérer davantage la cadence pour ne pas perdre beaucoup de temps comme les autres pays déjà en lice pour le nucléaire, notamment l’Égypte, l’Algérie, le Ghana, le Kenya, le Maroc, le Rwanda, Niger, le Nigéria et le Soudan. La plupart de ces Etats sont déjà engagés avec l’Agence internationale de l’énergie atomique pour évaluer leur degré de compatibilité avec un programme nucléaire. A ce jour, sur le continent, seule l’Afrique du Sud dispose d’une centrale nucléaire, celle de Koeberg, près du Cap, qui est dotée de 2 réacteurs d’une puissance de 920 MW chacun. La réalisation a pris au moins 8 ans, 1976-1984.

Les atouts du projet nucléaire du Burkina

Au-delà des contraintes techniques et financières au niveau national, le présent projet de construction d’une centrale nucléaire au Burkina Faso présente quelques atouts qui peuvent faciliter dans une certaine mesure sa réalisation dans de délais relativement courts. C’est d’abord l’engagement politique affiché en faveur du nucléaire au niveau des deux partenaires. Ensuite, il y a l’unicité de l’entreprise qui sera chargée de la réalisation de l’ouvrage en l’occurrence Rosatom, entreprise publique russe spécialisée dans le secteur de l’énergie nucléaire. Par ailleurs, si le projet n’est pas très grand, sa réalisation pourrait également prendre moins de temps. Ce qui n’est souvent pas le cas dans d’autres projets plus importants conduits par plusieurs entreprises de divers pays.

Temps de réalisation plus long avec les grands projets nucléaires

Par exemple dans le cadre de son ambitieux projet de production de 9,6 GW d’énergie nucléaire d’ici à 2030, l’Afrique du Sud par le biais de sa compagnie d’énergie nucléaire, Necsa, a signé au moins 5 accords avec des compagnies de pays différents :  Russie, France, Chine, Etats-Unis, Corée du Sud, etc. Cette multiplicité des parties prenantes, souvent en rivalité, est de nature à rallonger davantage les délais de réalisation des ouvrages. Ainsi, alors qu’on est quasiment à 6 ans de 2030, aucun réacteur nucléaire n’est encore sorti de terre dans le cadre de ce projet sud-africain alors que dès février 2015 l’ancien président Jacob Zuma tablait sur un premier réacteur en 2023.

Pour l’Egypte, destinée à devenir à long terme leader dans le nucléaire en Afrique, c’est en 2017 qu’elle a signé les accords avec Rosatom pour la construction de sa pharaonique centrale nucléaire d’El-Dabaa dont le lancement de la construction de la première unité est intervenu en juillet 2022. Cette centrale comprendra à terme 4 unités d’une capacité de production de 1 200 MW chacune et utilisant des réacteurs VVER-1200, l’une des technologies les plus performantes.

Autre modeste expérience : le Rwanda

Une autre expérience plus modeste mais qui implique plusieurs acteurs, c’est celle du Rwanda qui depuis 2019, prospectait également du côté de l’énergie nucléaire avec la signature d’un accord avec Rosatom. Finalement, le gouvernement rwandais signera un autre accord avec une start-up germano-canadienne pour construire un réacteur nucléaire civil « expérimental », afin de réduire sa dépendance aux énergies fossiles. Selon les prévisions, le réacteur sera prêt à être testé en 2026.

Pour notre cas, les choses pourraient prendre davantage plus de temps, puisque nous ne sommes qu’au début du processus et il reste encore beaucoup d’autres étapes à franchir. Entre autres étapes, il faudra identifier un endroit pour l’implantation de la centrale, un permis d’exploitation. N’ayant pas encore une mine d’uranium connue à ce jour, il faudra s’assurer de l’approvisionnement de la centrale en intrants. C’est la Russie ou le Niger qui va le faire et à quelles conditions ? Il faudra un personnel requis et assurer la maintenance de l’infrastructure.  Evidemment, tout cela ne se réunit pas du jour au lendemain. Il faut du temps et la constance dans l’engagement en faveur de la réalisation de ce type d’ouvrage. Si la centrale nucléaire venait à voir le jour, cela renforcerait notre mix énergétique et offrirait plus de possibilités d’émergence à notre industrie, à notre économie, à notre souveraineté car, il n’y a pas de souveraineté véritable sans autonomie énergétique, tout comme il n’y a pas d’impérialisme qui tienne sans indépendance énergétique.

Grégoire B. Bazié

Burkina Demain

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