La mesure du conseil des ministres du 30 mars dernier, visant le plafonnement des factures des personnalités de
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Une des mesures du conseil des ministres du 30 mars dernier ne saurait passée dans l’indifférence et le silence. J’ai tout fait pour l’avaler, mais en vain, car une maxime de Norbert Zongo, restée célèbre m’hantait l’esprit: « Le pire, ce n’est pas la méchanceté des gens mauvais, mais c’est le silence des gens bien ».

De fait, le gouvernement Kaba Thiéba a décidé de plafonner les crédits en deux (02) classes :
– Quatre cent mille (400 000) francs CFA par mois pour la catégorie 1, composée du Président du Faso, du Premier ministre, du ministre d’Etat, du ministre chargé de la Défense, du ministre chargé de la Sécurité et du ministre chargé des Affaires étrangères ;
– Deux cent mille (200 000) francs CFA par mois pour la catégorie 2, composée des Présidents d’institutions et des autres personnalités ayant rang de ministre.

C’est bien, c’est encourageant. On perçoit là une volonté de transparence. Le peuple sait dorénavant combien lui coûte la communication de ses hauts représentants. Toutefois, il y a à redire. On ne sait pas exactement combien les anciennes autorités déboursaient au titre de leur communication. Dans mes recherches, je suis tombé sur le décret N°2013- 1316/PRES/PM/MEF portant conditions et modalités de …….téléphone et services connexes dans les services et par les personnalités de l’Etat.

Le titre IV portant dispositions particulières au téléphone, article 19, alinéa 1, énonce: « Les présidents d’institutions et les ministres ont droit chacun à un (1) téléphone portable et à deux (2) cartes SIM post payées internationales avec roaming ». C’est tout le signe que les factures variaient d’un ministre à un autre.

Cette volonté de plafonnement me laisse aller à des interprétations:
– les ministres et présidents d’institution de l’ère Compaoré rivalisaient dans la gabegie et la démesure;
-les gouvernements précédents avaient perdu le sens de responsabilité;
-des membres du gouvernement actuel ne peuvent pas ne pas être éclaboussés par le prétendument scandale, d’autant plus qu’ils constituaient l’architecture de ce régime.

Et je me demande sérieusement si les autorités, qui par leurs actes, laissent entendre qu’elles ont pris conscience, avaient besoin de plafonner les charges inhérentes à la communication. A moins qu’il s’agisse d’une volonté manifeste de claironner des sons dérivatifs pour remplir nos oreilles, habituées, ces derniers temps, à se distraire des mesures spectaculaires frisant la démagogie. C’est tout comme.

Je m’interroge réellement sur l’efficacité et l’opérationnalité d’une telle mesure de plafonnement. Je ne crois pas qu’on puisse plafonner les charges de communication du chef de l’Etat, chef de la diplomatie, pas même du ministre des Affaires étrangères et de son collègue en charge de la Sécurité. C’est privé le pays d’un éventail inestimable d’opportunités.

Je m’explique: les dirigeants n’ont pas un don d’ubiquité. Cela étant, ils se doivent de nouer et d’entretenir des relations, par le truchement du téléphone, avec leurs homologues étrangers, des représentations diplomatiques, des Partenaires techniques et financiers et des réseaux d’amis, avant les rencontres physiques, aussi souvent matérialisées par le paraphe d’accords. La somme de 400 000 Francs CFA parait donc insuffisante pour ces hommes d’Etat.

De mon point de vue, l’idéal aurait été de maintenir la disposition précédente et de compter sur le sens de responsabilité de chacun d’eux. Ce d’autant que le premier ministre, Paul Kaba Thiéba a déclaré que ses collaborateurs ont été choisis sur la base des critères de compétence, de probité et d’intégrité. Ainsi donc aurait-il fallu les laisser faire et les apprécier à l’aune des factures qu’ils brandiraient à l’Etat. Ou bien, la confiance ne serait-elle plus de mise?

J’avoue que je suis tombé des nues dès que j’ai pris connaissance des montants alloués aux autorités pour leur communication. Il m’a fallu pousser la réflexion pour comprendre que les allocations peuvent paraitre insuffisantes pour certaines autorités et excessives pour d’autres.

En effet, j’avais vite fait une comparaison avec le salaire d’un cadre supérieur de la fonction publique qui perçoit un peu plus de 200 000 Francs CFA. Une rémunération à multiplier par 10 voire par 15 pour obtenir le salaire d’un président d’institution ou d’un ministre, arrosé encore de bons de carburant et logé gratuitement, sans jamais payer de factures d’eau et d’électricité, aux frais du pauvre contribuable. A l’heure qu’il est, subsiste une foultitude de questions.

Si l’élite dirigeante trouve nécessaire, en plus de son salaire mirifique et mirobolant, de se tailler encore une somme de 200 à 400 000 Francs CFA pour communiquer, pense-t-elle que le fonctionnaire anonyme qui croupit sous les charges de loyer, d’électricité, d’eau et de carburant, peut-il appréhender son message si l’exemple ne vient pas réellement d’en haut? Ne voit-elle pas que l’agent, submergé par ses problèmes quotidiens, vit déjà l’austérité pour qu’elle en vienne à rajouter de l’austérité à l’austérité? Ne sait-elle pas que ce dernier avait misé sur l’ouverture de la nouvelle ère pour sortir de la clochardisation? Et pense-t-elle pouvoir le mobiliser, en vue de la construction de l’édifice national, en le comprimant davantage, sous le prétexte de réduction du train de vie de l’Etat? Moi, je veux savoir!

Adama Bayala
Ecrivain, ouvrier de la plume

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