Cheick Oumar Sissoko, lors de l'entretien, le 29 janvier 2016, au siège de l'Union africaine, à Addis Abeba

Le Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO) tient du 3 au 7 mars 2016 la quatrième édition des Journées cinématographiques de la femme africaine (JCFA). Et s’il y a quelqu’un sur lequel le FESPACO et l’Afrique peuvent compter pour la promotion du cinéma africain dans son ensemble ; c’est bien le Malien Cheick Oumar Sissoko.

Double lauréat de l’Etalon de Yennenga décroché en 1995 et 1999 et secrétaire général depuis mai 2013 de la Fédération panafricaine des cinéastes (FEPACI), Cheick Oumar Sissoko, est un véritable monument du 7e art africain.

Entretien avec Monsieur Sissoko, par ailleurs ancien ministre malien de la culture, sur sa participation au 26e sommet de l’Union africaine tenu du 21 au 31 janvier 2016 à Addis Abeba sous la problématique des droits de l’Homme, notamment des femmes.

Cheick Oumar Sissoko, secrétaire général de la FEPACI, est très engagé dans la promotion du cinéma africain
Cheick Oumar Sissoko, secrétaire général de la FEPACI, est très engagé dans la promotion du cinéma africain

Burkina Demain : Quel l’objet de votre présence ici à Addis Abeba ?

Cheick Oumar Sissoko : Nous sommes ici pour suivre un dossier. Un dossier sur la création de la commission Africaine pour le cinéma et l’audio visuel et la création du fonds de promotion du cinéma africain. C’est un vieux dossier car, en 2003 déjà, le conseil exécutif avait accepté de permettre à l’Union Africaine avec la FEPACI de créer ces deux institutions. Nous avons travaillé depuis deux ans avec la commission des affaires sociales de l’Union Africaine et puis nous avons élaboré un état des lieux de la cinématographie africaine et les statuts des deux institutions, c’est-à-dire la commission africaine pour le cinéma et l’audiovisuel et le fonds de promotion de cinémas africain. Ils ont été introduits dans le circuit. Normalement ils devraient être discutés ici surtout qu’on a trouvé un pays, le Kenya, qui a accepté de financer leur fonctionnement pendant cinq ans.

 

Burkina Demain : Pourquoi vous dites normalement…

Sheick Oumar Cissoko : Je dis normalement parce que compte tenu de la lourdeur des activités, les discussions sur la question ont été renvoyées à la conférence des ministres de la culture au mois de mai 2016 et puis le processus se poursuivra en juin à Kigali lors du 27ee sommet de l’Union africaine.

Burkina Demain : Quel est l’intérêt de l’Union Africaine à investir dans le cinéma, la culture ?

Cheick Oumar Sissoko : Quand vous regardez, la culture, qui est le fondement de notre humanité, est laissée pour compte. Ici se retrouvent réunies toutes les hautes autorités du continent. C’est elles qui peuvent amener à avoir de meilleures considérations pour la culture. La culture fait figure de parent pauvre de tous les budgets africains ; alors qu’elle est essentielle non seulement sur le plan de l’éducation et des ressources humaines qui sont les principales ressources de chaque pays, mais aussi sur le plan économique. Aux Etats-Unis, par exemple, la culture est au deuxième rang après l’industrie de l’armement. Aujourd’hui, Nollywood est en train de prouver que la culture est rentable et c’est le cas en Egypte, au Maroc et en Afrique du sud. En même temps, l’image est le meilleur moyen par excellence de la communication sociale. Comment peut-on alors parler de l’agenda 2063, de la renaissance africaine, sans parler de l’image ? Le regard de l’Afrique, nous en avons besoin. Est-ce qu’il faut continuer à laisser nos télévisions diffuser les images des autres pays qui formatent l’esprit de nos enfants qui ne voient que sexe, pouvoir, crime et violence ? Non.

Cheick Oumar Sissoko, lors de l'entretien, le 29 janvier 2016, au siège de l'Union africaine,  à Addis Abeba
Cheick Oumar Sissoko, lors de l’entretien, le 29 janvier 2016, au siège de l’Union africaine, à Addis Abeba

Burkina Demain : Qu’est ce explique le fait que les pouvoirs publics tardent à prendre en compte cette question ?

Cheick Oumar Sissoko : Je pense qu’ils n’ont pas la meilleure information. Quand les programmes d’ajustement structurels ont été adoptés, l’on a exigé que les programmes sociaux soient vus à la baisse. C’est pour cela que nos salles de cinéma ont été vendues. Le Burkina est une exception dans le fait que les salles de cinéma existent toujours, mais partout sur le continent il n’y a plus de salles de cinéma. Alors il nous faut salles, des écoles de formations de haut niveau, des structures de productions et il nous faut des distributeurs. Donc il faut batailler pour l’avenir de l’Afrique. Ce continent est non seulement le coffre fort du monde mais sur le plan du patrimoine qu’est ce qu’il n’a pas créé en termes de patrimoine humain, culturel, spirituel et scientifique. Il faut que nous arrivions à montrer cela à nos jeunes et à l’humanité. Il faut que nous tavaillons à ce que nos images ne soient plus absentes dans l’univers des images.

Le Kenya où se trouve le secrétariat exécutif est disposé à nous aider parce que la FEPACI migre à chaque fois quand il y a un congrès parce qu’il faut qu’on trouve un pays pour payer de quoi mener nos activités. Il y a le secrétariat exécutif, mais le siège officiel est au Burkina depuis 1985. A tous les congrès, à l’unanimité les cinéastes votent à cause du rôle que le Burkina, tout pouvoir confondu, a joué pour le cinéma africain. Mais, aujourd’hui, c’est le Kenya qui se propose vraiment de payer pour les deux institutions pendant cinq ans.

Propos recueillis à Addis Abeba par Bazomboué Grégoire Bazié

Burkina Demain

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