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Pour mieux lutter contre le terrorisme, l’état d’urgence est prorogé de 18 mois à compter du 13 juillet dans 14 des 45 provinces que compte le Burkina Faso. Au regard des récriminations auxquelles cette mesure donne parfois lieu, il est nécessaire d’éclairer la lanterne de l’opinion sur les enjeux de l’état d’urgence et sur la manière dont chaque citoyen pourrait contribuer à l’efficacité de sa mise en œuvre.

 Les régions concernées par la mesure sont la Boucle du Mouhoun (Nord-est), le Centre-Est, l’Est, les Hauts-Bassins (Ouest), le Nord et le Sahel, où la situation sécuritaire se dégrade quotidiennement. La prorogation de l’état d’urgence vise à permettre aux autorités administratives de ces régions de poursuivre la prise des mesures adaptées à leurs zones de compétence dans la lutte contre le terrorisme et de restaurer la présence et l’autorité de l’Etat dans les zones occupées afin de favoriser progressivement le retour des personnes déplacées dans leurs localités d’origine.

Sur le plan légal, au Burkina Faso, l’état d’urgence et l’état de siège  sont régis par la loi N°023-2019/AN du 14  mai 2019.Selon l’article 10 de la loi précitée,  « l’état d’urgence est une situation de crise permettant aux autorités administratives de prendre des mesures exceptionnelles en matière de sécurité et qui sont susceptibles de porter atteinte aux droits et libertés des personnes.  L’état d’urgence peut être déclaré sur tout ou partie du territoire, soit en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public, soit en cas d’événements présentant le caractère de calamité publique de par leur nature et leur gravité. »

Selon l’article 13, le ministre en charge de la sécurité et celui en charge de l’administration territoriale, selon leurs domaines de compétence, ou le chef de circonscription administrative compétent, peut, dans les zones où l’état d’urgence est en vigueur requérir les personnes, les biens et les services, interdire la circulation des personnes ou des véhicules sur toute l’étendue de son ressort territorial ou dans des lieux précis et à des heures fixées par arrêté, ordonner des perquisitions, de jour et de nuit, dans les domiciles des citoyens, requérir ou faire requérir la force armée et lui confier des tâches de maintien ou de rétablissement de l’ordre en collaboration avec les forces de sécurité intérieures, contrôler, interdire et faire cesser tout enseignement, prêche, programme ou activité incitant à la violence, à la haine ou à l’extrémisme religieux, suspendre ou dissoudre tout groupe ou association qui participe ou incite à la commission d’actes portant atteinte à l’ordre public.

Malgré les pouvoirs étendus de l’administration, l’état d’urgence ne doit pas être appliqué d’une main de fer. « Les citoyens continuent, nonobstant l’état de siège ou l’état d’urgence, d’exercer leurs droits dont la jouissance n’est pas suspendue ». Il s’agit donc pour les autorités  de manier la carotte et le bâton  pour respecter les principes démocratiques.

Au Burkina Faso, au Mali et au Niger, l’état d’urgence a permis aux autorités d’adopter des mesures spéciales notamment sur le plan sécuritaire telles que les restrictions de déplacement, l’interdiction de circulation des motos ou pick-up ou encore la fermeture de certains lieux comme les marchés ou les foires hebdomadaires dans les zones touchées.

Les terroristes utilisent en effet  les motos pour commettre des attaques, ainsi que les marchés pour s’approvisionner en nourriture s’adonner à de la contrebande de toute nature pour financer leurs activités,…

Mais pour nécessaires qu’elles soient, ces mesures privent parfois les communautés d’une grande partie de leurs moyens de subsistance et augmentent ainsi leur vulnérabilité. Il s’en suit alors des protestations parfois violentes.

Les États de la région doivent remédier aux lacunes associées à ces actions de lutte contre le terrorisme et améliorer la communication avec les communautés locales lors de leur mise en œuvre.

Les restrictions devraient être progressivement assouplies lorsque la situation sécuritaire le permet. Elles pourraient aussi être accompagnées d’autres efforts en matière de fourniture des services sociaux de base, notamment l’accès à l’alimentation et aux soins de santé. En offrant ces services, les forces de défense et de défense pourraient jouer un rôle social et compenser le manque de personnel de l’État et d’organisations humanitaires dans ces zones.

Les mesures restrictives de lutte contre le terrorisme peuvent être contre-productives si elles rendent difficile l’établissement d’une relation de confiance entre le gouvernement et les citoyens. Pour prévenir et combattre l’extrémisme violent, les États du Liptako-Gourma doivent élaborer des stratégies fondées sur la communication et l’implication des communautés.

Cela renforcera les relations entre l’État et les citoyens ainsi que la résilience des communautés face à l’extrémisme violent. Il faut  savoir agir selon 3 principes  cardinaux: fermeté, sérénité, unité. La menace terroriste est mouvante. Il faut s’adapter en permanence et prendre en compte les évolutions des comportements des terroristes.

Jérémie Yisso BATIONO

Enseignant chercheur

Ouagadougou

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