Priva kabré, un citoyen, s’adresse, à travers cette tribune, à l’ancien premier ministre, Yacouba Isaac Zida. Il s’interroge sur sa responsabilités dans les accusations de malversations financières qui fleurissent contre lui et l’appelle à se défendre, au besoin à tout nier en bloc.
yacouba

Cher Général,

Ce matin j’ai rencontré une dame dans la pharmacie en face de mon bureau. Elle passait des minutes tristes. Au bord des larmes, il lui manquait 600 francs pour honorer son ordonnance de 2600 francs, pendant que son enfant à son domicile souffrait probablement d’une maladie banale.

Cette dame a pu payer sa facture. Certes. Mais quelle triste journée ! Quelle journée de questions mon général. Cette histoire semble anecdotique, mais j’ai l’intime conviction, et vous le savez, que ce n’est point un cas isolé. Des mères comme celle-là on en rencontre tous les matins.

D’où les questions. Pourquoi après plus de 50 années d’indépendance nous ne sommes toujours pas capables d’offrir la santé aux plus pauvres d’entre nous, pourquoi après 50 ans de luttes, discours, foules enflammées, nous ne répondons toujours pas aux besoins primaires des plus faibles : se nourrir et se soigner.

Je suis désolé mon Général, mais je n’ai pu m’empêcher de penser à vous. Circonstances obligent ? J’aurais pu penser à un certain douanier par exemple. Mais l’actualité fait que c’est votre nom qui trotte encore dans les têtes.
Ainsi donc ils vous accusent d’avoir signé des chèques de la présidence étant au premier ministère. Ils vous accusent d’avoir dépensé le milliard sur un compte de 200 millions. Ils vous accusent mon général d’avoir acquis des parcelles sur le dos de l’état. En somme ils vous accusent d’avoir trahi la révolution du peuple.
Pendant que de braves dames comme celle que j’ai rencontrée ce matin vous attendaient, pendant que les jeunes aux quatre coins du pays vous espéraient, se prenaient à rêver un monde meilleur. Oui mon Général, pendant que les hommes et femmes de Ouagadougou, pris dans l’euphorie des discours sankaristes, un matin d’octobre, plaçaient leur espoir en vous.
Je n’ai aucune preuve de la véracité de tout ce qui vous est reproché, mais reconnaissez, il y a rare de fumées sans feu. Alors, défendez-vous mon Général, niez tout ! Cars nous refuserons d’y croire en attendant que vous rejetiez tout en bloc. Ça nous autorisera au moins de continuer à rêver d’hommes intègres.

En attendant, on se souvient : ce goût amer dans la gorge, quant au sortir des chaudes journées d’octobre, ce fut finalement l’armée qui se retrouva propulsée en leader de notre révolution. Encore une fois ! Comment on se sentait déjà impuissant, à bout de souffle, quand ce fut encore un lieutenant-colonel qui était annoncé premier ministre. On n’osait plus y croire, mais on se prenait à rêver qu’il en sorte quelque chose. On aurait dû croire en la raison, une fois de plus. Cette voie sourde qui en sait plus que nous n’imaginons. Celle qui fait la somme des déjà vus et qui nous souffle dans l’ombre. Mais à laquelle on résiste, parce que la vérité blesse.

Mais où sont passés, tous ces Sankara, mourant sous les balles de ceux qui refusent la vérité, mais qui renaissent encore et toujours. Ils sont où tous les Mohammed Ali, refusant d’user de leur force juste pour la gloire des plus forts. Où sont passés tous ses braves hommes, partis de rien, sortis des néants, qui ensuite ont vu la lumière, qui savent par le vécu combien sont simples mais vitales les attentes des peuples que leurs leaders trahissent. Où enfin sont passés nos modèles ?

A toutes ses mères qui pleurent en silence, à celles qui les matins peuvent sentir le parfum agréable de la nourriture d’hier, laissée pour pourriture dans les poubelles de tous ces Généraux, tout en se demandant comment nourrir la famille ce midi ; n’abandonnez pas. Accompagnez vos enfants blessés par la malnutrition à l’école, encourager les à apprendre, même sous une paillote. Car de l’éducation sortira les hommes dignes et intègres, conscients et engagés que nous attendons tous.

A tous nos milliards, volés à la patrie, envolés vers le canada ou ailleurs, pendant que nous manquons de nourriture, d’hôpitaux, de médicaments, d’écoles. A tous ces milliardaires, nous ne succomberont pas. Nous pardonnerons un jour, mais nous n’oublierons pas, car c’est au fond en pensant à vous, à tout ce que vous n’avez pas fait que nous mesurons l’étendu de ce que nous pouvons faire ; l’ampleur de nos opportunités.

Priva KABRE

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