Après la trêve de la Covid-19, les organisations syndicales annoncent la reprise de leurs actions

Après la trêve imposée par la crise sanitaire de la Covid-19, les organisations syndicales burkinabè ont marqué ce lundi 8 juin leur retour par une conférence de presse à leur quartier général, la Bourse du Travail, à Ouagadougou. Ils entendent reprendre de plus belle les choses là où ils les avaient laissées si le gouvernement ne répond pas à leurs préoccupations dont la suppression de l’IUT. Plus d’infos dans leur déclaration liminaire.

Après la trêve de la Covid-19, les organisations syndicales annoncent la reprise de leurs actions sur le terrain

«Mesdames et messieurs les journalistes,

La Coalition des syndicats signataires du préavis du 27 février 2020 vous remercie pour la disponibilité que vous lui témoignez encore une fois en prenant part à cette conférence de presse.

Faut-il le rappeler, la Coalition s’est constituée autour d’une plate-forme en 5 points dont celui qui porte sur le pouvoir d’achat et qui a comme sous-point la question de l’IUTS. Les autres points non moins importants concernent l’arrêt des atteintes aux libertés démocratiques et syndicales, l’arrêt du pillage des ressources nationales, la garantie du droit à la sécurité des populations, le respect et la mise en œuvre des différents engagements pris par le gouvernement vis-à-vis des syndicats des travailleurs. Pendant ce temps, le premier ministre Christophe Marie Joseph DABIRE tente de nier sa responsabilité en affirmant devant les députés qu’il n’est pas responsable des dispositions de la loi sur la question de l’IUTS. Il oublie que le principe d’étendre l’IUTS sur les primes et indemnités du public a été annoncé par lui-même lors de la troisième session du Bureau politique national du MPP, le 28 septembre 2019 au Palais de la culture Jean Pierre GUINGANE.

Vous l’avez-vous-mêmes constaté, le monde du travail et les populations ont manifesté leur adhésion à la plate-forme et aux mots d’ordre de la Coalition à travers l’Assemblée générale du 26 février, la marche-meeting du 7 mars et la grève générale du 16 au 20 mars 2020.

Il en est ainsi car la plateforme est juste et pose les préoccupations des travailleurs et des couches populaires de notre pays. De ce fait elle constitue une base d’action contre les dérives catastrophiques du pouvoir MPP et associés de plus en plus impopulaires et isolés.

Malgré ces démonstrations populaires de rejet des mesures du pouvoir du MPP et de ses alliés, malgré l’annulation de la marche-meeting du 17 mars 2020, le pouvoir a choisi d’ignorer la Coalition : aucune réaction au préavis et aux correspondances adressées aux autorités, silence du chef de l’Etat sur les manifestations de la Coalition lors de ses deux adresses à la nation. Au même moment le même chef de l’Etat fait des spots télévisés dans lesquels il invite la population à éviter la stigmatisation des communautés. Nous voudrions informer le chef de l’Etat que la stigmatisation ne concerne pas seulement les groupes ethniques, mais peut porter aussi sur des corps sociaux comme les syndicats qui parlent au nom de centaines de milliers de membres et de la population en général. La stigmatisation et le mépris des organisations syndicales qui ne chantent pas ses louanges ou ne l’accompagnent dans ses errements, constituent un axe majeur de la politique sociale du pouvoir dirigé par Rock Marc Christian KABORE. De nombreux cadres du MPP théorisent cet ostracisme du monde du travail. La palme revient ces derniers temps aux sieurs OUOBA Bindi et SAWADOGO P. Clément, grands animateurs et responsables du parti. On aura aussi noté qu’à la différence de nombreux gouvernements, le nôtre s’est refusé à œuvrer à un apaisement du climat social par une renonciation à l’application de l’IUTS sur les primes et indemnités, comme le lui ont suggéré de nombreuses organisations de la société civile, un groupe d’experts et des partis politiques. Au contraire, il a poursuivi et amplifié la répression contre les travailleurs.

Comment se présente la situation depuis lors ?

Nous allons l’analyser en considérant tour à tour la crise sécuritaire, la situation au niveau de l’éducation, de la santé, et des ministères en charge de la communication et des finances.

On ne peut pas dire que la situation a favorablement évolué. Bien au contraire ! Les constats ci-après sont illustratifs de la dégradation de la situation.

L’insécurité s’est aggravée avec trois attaques terroristes en deux jours qui ont fait plus de cinquante morts (civiles et militaires) à l’Est (Kompienbiga), au Centre-Nord (Foubé) et au Nord (Solé-Titao). En lien avec ces attaques, la pratique des exécutions sommaires et extra-judiciaires illustrées récemment par la mort d’un enseignant à la brigade de gendarmerie de Bendogo puis de 12 présumés terroristes à Tanwalbougou compromettent la collaboration des populations avec les FDS. Plus grave, elles mettent à mal le vivre-ensemble des populations, installant les risques de conflits intercommunautaires.

S’appuyant sur la survenue de la pandémie due au coronavirus, le gouvernement a procédé à la fermeture des classes à tous les niveaux du système éducatif. Après quatre reports successifs, il vient de décider de la reprise des classes uniquement pour les classes d’examen, sans réunir correctement les conditions minimales que lui-même a édictées pour protéger les élèves et les enseignants. Mieux, alors qu’il a pris connaissance des préalables posés par certains syndicats, il a choisi de se taire sur les préoccupations posées, notamment les suspensions de salaires abusives dont ont été victimes des centaines d’enseignants.

Cette reprise des cours, qui exclut les classes intermédiaires, aura pour effets :

d’impacter négativement les résultats des élèves puisqu’il est reconnu que les programmes ne seront pas achevés alors que les sujets vont très probablement porter sur l’ensemble des programmes (exécutés ou non) ;

de compromettre la suite des études de nombreux élèves qui vont passer en classe supérieure sans acquérir le niveau requis ;

d’alourdir la charge des parents qui, pour certains seront dans l’obligation de recourir à des «répétiteurs» pour relever le niveau de leurs enfants, qui, pour d’autres seront contraints de payer la scolarité plusieurs fois pour leurs enfants qui auront du mal à évoluer convenablement dans leur cursus scolaire ;

En outre, la pandémie a révélé l’état lamentable du système de santé avec des infrastructures et des plateaux techniques très peu performantes. Elle a aussi montré la pertinence des luttes et des multiples interpellations des travailleurs de la santé. Non content de ne pas mettre en œuvre les engagements qu’il a pris avec le SYNTSHA dans le cadre du protocole signé depuis 2017, le gouvernement, à la faveur de la pandémie, a suspendu le processus de remboursement des salaires coupés en fin 2019 convenu avec les syndicats.

D’une manière générale, d’ailleurs, la gestion de cette pandémie reste marquée par le tâtonnement, par la non implication des organisations syndicales (pompeusement appelées partenaires sociaux) dans l’adoption des différents plans et mesures. Nos organisations ne peuvent être réduites à recevoir les informations sur des mesures qui bien souvent, non seulement sont incomplètes ou inappropriées, mais aussi et surtout ont un impact néfaste sur le monde du travail. Par ailleurs le gouvernement a annoncé un plan de riposte d’un coup de près 171 milliards. A ce jour aucun point, même a mis parcours, n’est fait à l’opinion quant à la somme mobilisée et les dépenses exécutées notamment les équipements sanitaires réalisés.

Au niveau du ministère en charge des finances, profitant d’un incident survenu entre des agents à la DCI/Ouaga I, le gouvernement a, au cours du conseil des ministres du 27 mai 2020, prononcé la révocation de trois agents de ladite direction accusés « d’actes d’indiscipline d’extrême gravité ». Cette décision a été prise après l’échec de multiples tentatives menées par les autorités d’inciter la «victime» à déposer plainte contre sa camarade. Elle fait fi de l’initiative menée par le syndicat de réconcilier les deux collègues, ce qui a été matérialisé par une cérémonie solennelle et un procès-verbal rendu public. On ne peut que s’étonner de l’extrême sévérité de la sanction qui ne prend pas en compte les circonstances de l’incident, comme le prévoit la loi et qui pêche dans sa procédure. La sanction annoncée, qui a touché même ceux qui se sont investis pour arrêter la querelle, vise en réalité à effrayer les travailleurs. Plus éloquent est le cas de l’ex-ministre d’Etat, Simon COMPAORE, qui a été aperçu dans un domicile, tenant fièrement une arme de guerre et proférant des menaces. Une plainte a même été déposée contre lui à la gendarmerie qui, jusque-là est restée sans suite !

Au niveau du ministère de la communication, le gouvernement a opté de suspendre les discussions engagées avec le SYNATIC autour de sa plateforme pour passer à des mesures répressives inédites : Interdiction des travailleurs d’accéder à leur lieu de travail, interdiction des rencontres du SYNATIC dans les locaux des médias, en violation flagrante des libertés syndicales, affectations massives et arbitraires de travailleurs des médias publics vers des Directions centrales ou déconcentrées du Ministère. Ces affectations ont vidé la RTB et les Editions Sidwaya de centaines de cadres compétents. Par cette répression, les autorités affichent clairement leurs velléités de caporaliser les médias publics, avec pour conséquence une surcharge de travail pour leurs travailleurs, la baisse de la qualité des prestations sur le plan professionnel ainsi que la remise en cause du caractère public et indépendant de ces medias.

Au niveau du ministère des mines, c’est le comble dans la gestion de ce secteur. Les richesses du sous-sol sont extraites au profit des multinationales et de leurs alliés.

Mesdames et messieurs les journalistes,

Vous comprenez que dans ce contexte de reculs graves et continus caractérisant la gouvernance MPP et associés, les syndicats membres de la Coalition, tout en réaffirmant la pertinence de la plate-forme de la Coalition :

interpellent le gouvernement sur son rôle régalien d’assurer la sécurité des personnes et de leurs biens notamment dans les régions où sévit le terrorisme ;

expriment le soutien ferme de la Coalition aux luttes que mènent plusieurs de ses organisations membres (Syndicats de l’Education, CS-MEF, SYNTSHA, SYNATIC, Collectif des Policiers Municipaux, …)

exigent du gouvernement l’examen de la plate-forme de la Coalition;

exigent la levée sans délai des sanctions arbitraires contre les travailleurs à savoir la révocation des travailleurs des impôts et la restitutions des salaires coupés illégalement;

appellent leurs militant(e)s, sympathisant(e)s à renforcer la mobilisation et à rester à l’écoute pour des mots d’ordre dont la Coalition précisera la nature et les modalités de mise en œuvre dans les jours à venir.

Avant de vous donner la parole, nous voudrions dire un mot à l’endroit de tous ceux qui appellent les syndicats à aller à la table de négociation. Nous tenons à rappeler ici que depuis que notre coalition est née, malgré les actions qu’elle a menées (grève, marches meetings sur l’ensemble du territoire) et les correspondances qu’elle a adressées aux plus hautes autorités, elle n’a jamais été invitée à une quelconque rencontre, ni même reçu une quelconque réponse.

Mesdames et messieurs les journalistes, vous avez la parole.

Pour la Coalition

Le Porte-Parole

Bassolma BAZIE

SG/CGT-B »

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